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Une percée à partir de la force interne
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Trân Si Chương, expert en économie |
Photo : CTV/CVN |
Le monde est profondément reconfiguré géopolitiquement et économiquement, confronté aux nombreux défis tels que changement climatique, concurrence technologique et réorganisation des chaînes d’approvisionnement. C’est une occasion historique de percée pour le Vietnam et sa politique extérieure flexible.
Le secteur agricole constitue un point de départ crucial, pourvoyant à la subsistance de plus de 60% de la population. Il doit se développer vers une agriculture intelligente. Le Vietnam possède de grands atouts en termes de superficie cultivable, de diversité climatique, ainsi que d’articles d’exportation majeurs comme riz, café, poivre, noix de cajou et produits aquatiques. Mais il doit affronter bien des obstacles, tels que pollution des sols, changement climatique, manque d’innovation et de recherche approfondie sur les variétés végétales.
Les technologies comme l’Internet des objets (IoT), l’intelligence artificielle (IA) et la blockchain (chaîne de blocs) sont une clé pour accroître le rendement, améliorer l’efficacité des chaînes d’approvisionnement et optimiser la rentabilité de la production. Par exemple, la blockchain assure une traçabilité transparente pour ouvrir l’accès à des marchés haut de gamme, tout en permettant d’augmenter la valeur des produits de 20%. Grâce à une croissance annuelle de 10% de la productivité, le PIB pourrait passer de 7% à 10% d’ici cinq ans.
Le secteur des technologies de l’information représente environ 14% du PIB. L’IA, les drones, le big data (mégadonnées) et le cloud computing (informatique en nuage) sont utilisés pour optimiser la production et établir des chaînes d’approvisionnement en temps réel, contribuant à la modernisation de l’agriculture ainsi qu’au développement d’une économie de connaissance et de services à forte valeur ajoutée.
Le succès de l’agriculture intelligente dépend de la construction d’un écosystème global et synergique englobant terres, semences, techniques, technologies, formation, financement, débouchés et politiques publiques. Il est essentiel de promouvoir les zones agricoles de haute technologie, les incubateurs d’innovation, la formation aux compétences numériques pour les agriculteurs, ainsi que de mettre en place un cadre juridique adapté aux nouveaux modèles économiques.
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Vers une agriculture intelligente grâce aux zones high-tech et à la transformation digitale. |
Photo : VNA/CVN |
Les centres de recherche en transformation avancée dans les deltas du fleuve Rouge et du Mékong permettent au Vietnam d’exporter des produits alimentaires transformés haut de gamme au lieu de se limiter aux matières premières agricoles.
Par exemple, l’entreprise Nafoods, spécialisée dans la transformation du fruit de la passion, expédie vers plus de 70 pays, tandis que Vinamit, avec ses fruits séchés moelleux et lyophilisés, exporte vers les États-Unis, le Japon et la République de Corée, illustrant le fort potentiel de la stratégie de transformation approfondie et de création d’une marque vietnamienne.
Le pays se trouve à un carrefour historique : un monde incertain mais riche en opportunités. S’il sait se développer lucidement à partir de ses forces intérieures, il pourra réaliser une percée et devenir une économie de la connaissance, moderne et autonome.
Accélérer la recherche et le développement
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Le Dr. Pham Manh Hùng, professeur à l’Université d’économie (relevant de l’Université nationale de Hanoï). Photo : CTV/CVN |
Le Parti et l’État vietnamiens envisagent de porter les investissements dans la recherche et le développement (R&D) à 2% du PIB d’ici 2030, afin de stimuler l’innovation et de favoriser une croissance économique durable.
Cependant, de nombreux freins subsistent, notamment un mécanisme financier obsolète, complexe et rigide, qui impose une lourde charge administrative aux chercheurs, les contraignant à passer plus de temps sur les formalités que sur l’activité créative elle-même.
Il est ainsi nécessaire de le réformer en accordant davantage d’autonomie, en passant du financement à court terme à celui à moyen et long termes, en simplifiant les procédures de décaissement et en adoptant une approche de contrôle rétrospective plutôt qu’anticipative afin de créer un environ-nement aussi possible que favorable à la créativité.
Le rôle des entreprises, en particulier du secteur privé, dans le système de R&D reste encore très marginal. Les sociétés vietnamiennes investissent pour cela bien en deçà de la moyenne régionale. Les liens entre entreprises et instituts de recherche ou universités sont demeurés faibles, les mesures de soutien ne sont pas assez incitatives et les procédures administratives restent lourdes.
Il importe donc de mettre en place des politiques spécifiques, des incitations fiscales, des aides financières, de simplifier les formalités et de développer les ressources humaines de haute qualité. Parallèlement, les sociétés publiques doivent être restructurées pour devenir plus efficaces, plus légères et capables d’investir de manière structurée dans la R&D en concurrence équitable avec le secteur privé.
Il faut également renforcer l’intégration entre l’enseignement, la recherche et l’application pratique. Actuellement, les universités se concentrent principalement sur les publications internationales pour améliorer leur classement, au lieu de produire des connaissances utiles à la production et à la société. La formation de ressources humaines hautement qualifiées présente encore de nombreuses lacunes, notamment l’absence de mécanismes de formation postdoctorale appropriés, limitant la qualité des recherches.
Le système public de R&D reste morcelé et lourd. Il est aussi indispensable de restructurer et fusionner les instituts de recherche publics afin de mener à bien des projets d’envergure, de supprimer les obstacles financiers, administratifs et institutionnels, rattrapant ainsi les tendances mondiales pour élever la position du Vietnam dans l’avenir.
Xuân Lôc/CVN